Réponse de Mgr Pivarunas à l’article de Stephen Heiner contre la CMRI

Traduction en français de la réponse rédigée par Mgr Pivarunas à l'article de Stephen Heiner attaquant la CMRI. Texte original en anglais : https://cmri.org/pdfs/response-to-stephen-heiner.pdf

 

Liens vers les articles de Stephen Heiner en français:

https://www.truerestoration.org/cmri-partie-3-reponse-du-clerge-et-conclusion/

 

Récemment, Stephen Heiner, un laïc relativement nouveau dans le mouvement catholique traditionnel, a publié deux articles dans son blog dans lesquels il critique le CMRI. En outre, M. Heiner exhorte les catholiques à éviter la CMRI, qu’il reconnaît, de son propre aveu, comme étant  « apparemment la plus grande organisation catholique traditionnelle sédévacantiste au monde ».

 

Une telle déclaration est loin d’être anodine, dans la mesure où la CMRI compte 3 évêques catholiques traditionnels, plus de 70 prêtres catholiques traditionnel, et plus de 150 religieux et religieuses de différentes communautés religieuses.

 

Comment M. Heiner en arrive-t-il à tenir une position aussi absurde ? Cela tient au fait qu’il n’a pas conscience qu'il y a toujours eu et il y aura toujours une diversité d’opinions sur certains sujets au sein de l'Église catholique. Il n'a donc pas le droit de condamner la CMRI simplement parce qu'il n'est pas d'accord avec eux sur certains sujets.

 

Avant d'aborder les deux questions principales de sa critique - la question de l’una cum et la question des décisions matrimoniales – passons en revue quelques exemples de divergences d'opinion dans l’histoire de l’Eglise catholique.

 

Dans l'histoire de l'Église catholique, il y eut par exemple un désaccord majeur entre l'Ordre franciscain et l'Ordre dominicain avant la proclamation par le pape Pie IX du dogme de l'Immaculée Conception de la Bienheureuse Vierge Marie en 1854.

Dans les années 1950, il y eut une divergence d'opinion entre le Saint-Office La Rote romaine (l'un des trois tribunaux de l'Église catholique romaine.) en ce qui concerne l'empêchement dirimant de l'impuissance (Canon 1068) pour le mariage.

 

Il y eut également une divergence d'opinion entre saint Thomas d'Aquin, et saint Bonaventure, sur les mots considérés comme essentiels pour la forme de la consécration de la Sainte Eucharistie.

 

Quiconque a des bases en théologie morale, droit canonique ou théologie dogmatique a conscience qu'il existe des divergences d'opinion entre les théologiens. Pour autant, aucuns de ces théologiens n’ont jamais exhorté les fidèles catholiques à éviter de recevoir les sacrements de ceux avec qui ils se trouvent être en désaccord.

 

A propos des divergences d'opinions, M. Heiner connaît sûrement les divergences entre Mgr Dolan et Mgr Sanborn sur le sujet de la moralité des vaccins contre le Covid-19 ou sur la question de la papauté. Mgr Dolan considère le fait de recevoir le vaccin comme un péché mortel alors que ce n’est pas l’avis de Mgr Sanborn. Mgr Dolan affirme que la position de Mgr Sanborn sur la papauté (François Ier est un pape matériel, c'est-à-dire qu'il est suffisamment catholique pour être valablement élu mais pas assez catholique pour recevoir l'autorité de la papauté) est proche de l'hérésie.

 

Un autre exemple qu’on pourrait donner fut la situation triste de Terri Schiavo, il y a quelques années  qui fit la une des journaux. Terri Schiavo était handicapée et avait besoin d'un tube d'alimentation inséré dans son estomac pour se nourrir et s'hydrater. Tant le regretté P. Cekada (que Dieu accorde la paix à son âme) et l'évêque Mgr Sanborn ont soutenu que le tube d'alimentation était un

moyen extraordinaire pour préserver la vie et qu'il n'y avait aucune obligation d'effectuer cette simple intervention sur cette femme. Mon opinion est qu'un tube d'alimentation n'est pas extrêmement douloureux ni extrêmement coûteux (en fait, il y a près de 100 000 personnes aux États-Unis qui pour pouvoir s’alimenter ont besoin d’un tube d'alimentation dans l'estomac) et donc ce n'est pas un moyen si extraordinaire que cela pour préserver la vie.

 

Dans le domaine de la liturgie, le pape Pie XII institua la fête de Saint Joseph, Patron des Travailleurs (1er mai) afin de combattre le communisme athée. Mgr Sanborn et Mgr Dolan rejettent tous deux cette fête universelle de l'Église catholique et je ne crois pas qu'ils aient l'autorité pour prendre une telle décision. Le Concile Vatican I (1870) enseigne : « Nous déclarons que le jugement du Siège apostolique, auquel aucune autorité n’est supérieure, ne doit être remis en question par personne, et personne n’a le droit de juger ses décisions. »

 

Pour moi, un appel au principe d'epikeia, dans un tel cas, n’est pas raisonnable. Comme le pape Pie XII a établi cette fête avec l'intention affichée de combattre le communisme, il ne peut y avoir aucun appel raisonnable à "une interprétation bénigne de l'esprit du législateur contre la lettre claire de la loi". Il n’existe non plus aucune raison de faire appel à une cessation intrinsèque de la loi en prétendant que cette fête serait maintenant devenue préjudiciable au bien commun de l'Église.

 

Abordons maintenant les deux points de la critique de M. Heiner vis-à-vis de la CMRI. La première question est la question de l’una cum, c'est-à-dire la participation des fidèles aux messes en latin offertes par les prêtres traditionnels et qui nomment à tort le nom du faux pape de Vatican II au canon de la messe. Par souci de brièveté, je vais résumer mon article (« Mes réflexions sur le problème de l’Una Cum »):

 

Extraits de mon article :

« Avec sagesse, St. Augustin, a dit : « Discerner les péchés qui excluent du royaume de Dieu, est ce qu’il y a de plus difficile à déterminer et le plus périlleux » ; pourtant il a parlé de certains crimes, comme l'adultère, qui sont évidemment des péchés mortels. S. Raymond de Penafort va dans le même sens : « Ne soyez pas top enclins à juger les péchés comme étant des péchés mortels tant que vous n'en avez pas la preuve la plus complète » ; et saint Thomas dit: ‘Il est périlleux  de décider quels péchés sont mortels, à moins que nous ayons un enseignement positif pour nous guider.’ »

Sur la base de ce principe, j'ai ensuite cité l'opinion d’un certain nombre de prêtres sur la question d'assister ou non à une messe Una Cum.

 

Le Père Martin Stepanich, (un prêtre sédévacantiste qui a fêté ses 70 ans de sacerdoce) a dit :

 

« Si nous essayons d'utiliser les paroles des papes et des théologiens pré-Vatican II, comme déjà cité ci-dessus, pour leur faire dire que la participation aux messes una cum Benoît XVI est toujours absolument interdite en toutes circonstances, c'est nous qui décidons ce genre d'interdiction, pas les papes et les théologiens d'avant Vatican II. Essayez simplement de trouver quoi que ce soit chez les papes et les théologiens pré-Vatican II qui interdise totalement et absolument toute participation aux messes una cum Benoît CVI par les catholiques sédévacantistes traditionnels. Ca n’y est pas. »

 

Le Père Noel Barbara, un vieux prêtre traditionnel français bien connu et un proche de Mgr. Guérard des Lauriers, a traité cette question avec la même approche que la mienne:

 

"Est-ce un péché d'assister à de telles célébrations ? L'Église interdit aux fidèles de participer ou d'assister aux cérémonies des hérétiques et des schismatiques FORMELS. Les prêtres 'una cum' entrent-ils dans cette catégorie ? En ce qui me concerne, je ne le pense pas. Quelle que soit la situation, tant que la preuve de leur hérésie formelle ou de leur schisme n'est pas établie, on ne peut considérer ceux qui disent la messe una cum que comme des ministres « scandaleux », c'est-à-dire scandaleux parce que leur messe représente un scandale pour la foi.

 

Il convient donc d’appliquer les règles de l'Église à l'égard de tels prêtres. Les fidèles qui n'ont pas d'autre messe disponible, sont dispensés d'assister à la messe, même les jours d'obligation, si les messes disponibles sont contraires à leur foi. Par contre, si pour quelque raison que ce soit, ils ressentent le besoin de participer, ils peuvent assister et participer à ces messes étant donné qu’aucune autre messe ne leur est accessible. Dans cette situation, seul le prêtre est coupable de scandale, à condition bien sûr qu'il n'ignore invinciblement le scandale que sa messe constitue »

 

À la fin de mon article, j'ai ajouté notre déclaration publique, publiée en 2002 concernant la participation aux messes una cum. Voici quelques extraits :

 

« La Congrégation religieuse de Marie Immaculée Reine (C.M.R.I.) soutient que les fidèles catholiques peuvent demander les sacrements aux prêtres catholiques traditionnels qui, malheureusement, offrent leurs messes « una cum » (Jean-Paul II).

« Cela ne signifie pas que la C.M.R.I. approuve la position théologique contradictoire de ces prêtres traditionnels qui soutiennent que Jean-Paul II est un vrai pape.

« Enfin, nous exhortons les fidèles à faire preuve d'une grande discrétion lorsqu'ils s'adressent à de tels prêtres pour les sacrements. Cela est particulièrement vrai à l'égard de leurs enfants, qui peuvent être induits en erreur par leurs opinions erronées sur la papauté et sur l'infaillibilité de l'Église."

 

Pour être clair, je n'exige pas que les gens assistent aux messes una cum et je n'interdis pas non plus d'assister à de telles messes. Ce choix est laissé à l’appréciation prudente des laïcs.

 

Le deuxième sujet de la critique de M. Heiner à l'égard de la CMRI concerne les affaires matrimoniales. Dans son "CMRI Partie  II", il omet commodément ma réponse directe à son premier article, que j'ai envoyé par l'intermédiaire de Dan Davis. Voici ma réponse à M. Heiner, qu'il a opportunément ignorée :

 

« Votre affirmation selon laquelle CMRI reconnaît les annulations de mariage faites par l’église Novus Ordo est complètement fausse.

Et deuxièmement, les décisions morales que la CMRI a prises sont très rares et étaient fondées sur des preuves objectives et des faits concrets, ce qui, selon les principes énoncés par le pape Pie XII, permet d’établir la certitude morale dans ces cas.

 

«Lorsque Mgr McKenna a aidé la CMRI dans de telles décisions morales, il n'a jamais prétendu posséder une juridiction ordinaire comme le fait un évêque diocésain, ce qui serait une annulation au vrai sens du terme. Néanmoins, Mgr McKenna, suivant la position théologique de Mgr Gérard de Laurier, soutenait que les évêques traditionnels, malgré leur absence de juridiction ordinaire, perpétuent la « missio » de l'Église catholique. La « missio » est la mission de l'Église catholique pour le salut des âmes.

 

«Sur la base de cette position, Mgr McKenna a aidé la CMRI dans ces décisions concernant des mariages. Ce problème d'absence de juridiction ordinaire ne se limite pas aux affaires de mariage et soulève des problèmes dans de nombreux autres domaines réservés au Saint-Siège tels que l'absolution des excommunications, la dispense des vœux religieux , les empêchements à l'ordination sacerdotale, etc.

 

"En conclusion, votre affirmation selon laquelle CMRI n'est pas sérieuse est totalement irresponsable."

 

La plupart des cas de mariage présentés à la CMRI ne peuvent pas être résolus simplement parce qu'il n'y a pas de preuves pour prouver avec une certitude morale qu'il n'y a pas eu de mariage valide. La CMRI observe le canon 1014 qui protège le mariage. Ce canon édicte que « le mariage jouit du privilège de la loi » ; en cas de doute, le mariage est présumé valide.

 

Le coeur du problème est que des évêques et des prêtres traditionnels bien connus ont tenu la même position que la CMRI sur ces questions et qu'il n'y a aucune raison pour qu'un simple laïc et blogueur, M. Heiner, exhorte les fidèles catholiques à éviter "le la plus grande organisation catholique traditionnelle sédévacantiste au monde ».

 

Je voudrais conclure cette réponse à M. Heiner en rappelant qu'il viole le droit canonique. L'Église a le droit d'interdire la publication de livres par les fidèles à moins qu'elle ne les ait officiellement examinés au préalable. La disposition des canons 1384-1405 inclus, concernant les livres, doit être appliquée également aux publications quotidiennes, périodiques et autres écrits de quelque nature que ce soit (canon 1384). M. Heiner doit déclarer publiquement quel évêque diocésain et quel censeur diocésain ont approuvé ses écrits ou il doit admettre qu'il viole le droit canonique. S'il avait respecté ces canons du code, il n'aurait pas commis les graves erreurs contenues dans son blog !

 

Que Marie, la Mère de Dieu, intercède pour nous, pauvres fils déchus d'Eve, et qu'elle prie pour nous maintenant et à l'heure de notre mort.

 

Par Mgr Mark A. Pivarunas, CMRI

 

 


Traduction: Brice Michel